On entend souvent dire : “En hiver, la nature se repose.” En réalité, la nature s’adapte et poursuit une vie plus souterraine, moins exubérante qu’au printemps lorsque la vie ressurgit de partout. Mais allons-y voir de plus près.
Dans un tas de feuilles mortes une feuille apparaît, couverte de duvet blanc.
C’est une feuille de platane tombée à terre en automne et poussée par le vent dans un coin humide. Une spore de champignon s’est trouvée là et a germé et s’est développé en éventail. Le champignon trouve dans la feuille des tanins qui vont lui permettre de se nourrir et de prospérer. Les feuilles de platanes sont difficiles à décomposer parce que les tanins établissent des liaisons fortes. Mais le champignon sait les casser pour se nourrir de molécules carbonées. Le champignon est capable de s’attaquer au bois pour le décomposer.
Mais la nature fait beaucoup mieux. Le rôle des champignons dans le sol va bien au-delà de la décomposition de la matière organique carbonée et cela représente un enjeu considérable que nous avons tout intérêt à comprendre et à favoriser : Les champignons sont capables de faire circuler dans leurs filaments de l’eau et des nutriments qu’ils peuvent partager avec d’autres champignons mais aussi avec des plantes. Il s’établit alors symbiose entre la plante et le champignon, c’est la mycorhize : la plante donne environ 20 % de sa sève élaborée riche en molécules carbonées élaborées par la photosynthèse et le champignon donne de l’eau et des nutriments (par exemple du phosphore) qui a circulé dans le réseau mycélien. Ces échanges se font au niveau des racines et bénéficient aux deux partenaires : L’arbre donne de la sève élaborée contenant des molécules carbonées qu’il sait synthétiser et le champignon donne des nutriments et de l’eau qu’il est capable d’aller chercher là où les racines des arbres ne vont pas. Prodigieux !
On comprend bien qu’il y a tout intérêt à bénéficier de ce commerce vertueux que la nature a mis au point il y a des centaines de millions d’années. On comprend mieux qu’il faut éviter de casser ces réseaux mycéliens par un travail du sol systématique et brutal et que tous les produits biocides vont avoir des conséquences désastreuses. Et même les engrais chimiques : quand on donne des engrais aux plantes, elles arrêtent de donner de la sève au réseau mycélien, la mycorhize régresse, le sol s’appauvrit durablement.